Récemment, j'ai déménagé sur l'île de la Réunion. Lors d'une fête locale, un concours de cari était organisé.
Il s'agit d'un plat typique local à base d'oignon, d'ail, d'épices et de tomates, servi avec du riz et qui accompagne des viandes, poissons ou œufs.
Suite au désistement d'un des juges, les deux restants (natifs de l'île) m'ont demandé de les assister en ma qualité de cuisinier de la métropole.
Craignant les plats trop épicés, je leur demande si c'est raisonnable.
Ils m'expliquent que ceux présentés ici n'allaient pas être trop pimentés. Suite à leur assurance, je deviens donc le juge numéro 3.
Voici les notes du concours :
- CARI # 1 – LE RED VESUVIO DE MICHOU LE TARÉ.
Juge 2 -- Agréable saveur de tomate. Assez peu épicé.
Juge 3 (Moi) -- Nom de dieu, c'est quoi cette horreur ? Ca doit décoller la peinture ce truc ! Il m'a fallu avaler deux Dodo (la bière locale) pour calmer la brûlure. J'espère que ce cari était le pire d'entre eux. Sont complètement tarés.
- CARI # 2 – LE CARI À RÉACTION DE MAMA TIPOUZE
Juge 2 -- Goût barbecue intéressant. Plus de piments l'aurait rendu plus passionnant.
Juge 3 -- A tenir hors de portée des enfants. Je ne sais pas trop ce que je dois noter sur ces plats, à part la douleur qu'ils m'infligent. J'ai du repousser deux personnes qui pensaient que j'étais en train de faire un arrêt cardiaque. Il m'a encore fallu deux Dodo pour survivre.
- CARI # 3 – LE CARI FAMEUX ET FUMEUX D’ALFRED
Juge 2 -- Un peu trop salé, bonne utilisation des piments.
Juge 3 -- Appelez Greenpeace, je viens de découvrir un site d'enfouissement d'uranium. Et j'ai l'impression d'avoir sniffé du Destop par le nez. Mais maintenant les gens sont rodés et m'amènent directement une bière après chaque bouchée de cari, afin d'éviter que je m'embrase. J'ai du mal pour respirer et quand j'essaie d'avaler de l'air, je fais des bulles avec ma bouche. Je fais aussi des bulles de larmes avec mes yeux quand je cligne. En plus, je commence à être bourré avec toute cette bière.
- CARI # 4 - MAGIE NOIRE
Juge 2 -- Soupçon de citrons dans le riz, intéressant pour accompagner du poisson ou d'autres plats légers mais ce n'est en aucun cas un cari.
Juge 3 -- j'ai senti un truc passer sur ma langue mais je suis incapable de ressentir quoi que ce soit au niveau du goût. Je me demande s’il est possible de bruler les capteurs de la langue ? Mimi, la serveuse reste maintenant derrière moi avec une caisse de bière. Cette vieille créole de plus de 100 kilos commence à m'exciter... le cari serait-il aphrodisiaque ?
- CARI # 5 – LES LÈVRES EN FEU DE NATHALIE
Juge 2 -- Un cari de viandes émincées, manque de tomates. Je dois avouer que le piment d'oiseau sait se faire remarquer.
Juge 3 -- J'ai les oreilles qui bourdonnent, mon front sue et je n'arrive pas à faire le point avec mes yeux. J'ai pété et quatre personnes derrière moi se sont senties mal. La préparatrice du plat s'est offusquée parce que je lui ai dis que j'allais avoir des lésions au cerveau à cause d'elle. Ma langue s'est mise à saigner beaucoup mais Mimi la serveuse a cautérisé avec de la bière. Les autres juges m'ont demandé d'arrêter de geindre sans arrêt, qu'ils aillent se faire foutre.
- CARI # 6 - MELI-MELO VEGETARIEN DE VARGA
Juge 2 -- Le meilleur pour l'instant. Utilisation osée et généreuse des piments, de l'ail et des oignons, Superbe.
Juge 3 -- Mes intestins ne sont plus qu'un tuyau rigide rempli de flammes et de soufre. Je crois que mon dernier pet n'était pas vraiment contrôlé et j'ai l'impression que ça bouffe le bois de ma chaise. Personne n'ose plus rester derrière moi, à part Mimi. Je ne sens plus mes lèvres, je ne sens plus mes dents, je ne sens plus rien et je sue du piment. Je voudrais plonger mon derrière dans de la neige fraîche.
- CARI # 7 - STUPEUR ET TREMBLEMENTS
Juge 2 -- Comment dire, on a l'impression que le cuisinier a jeté une botte de piments dans le cari au dernier moment. Sans intérêt. J'aimerais souligner que l'état du juge 3 m'inquiète de plus en plus. Il a l'air complètement défoncé et ne cesse de proférer des jurons.
Juge 3 -- Allez-y, mettez-moi une grenade dans la gorge, tirez la goupille, je suis sûr que je ne sentirai rien. J'ai perdu la vision de l'œil droit et les voix me parviennent comme si j'étais sous l'eau. Ma chemise est recouverte de la sauce tomate qui bave doucement de ma bouche. Mon pantalon est empli d'un gaz nauséabond que je produis par intermittence, toutes les 30 secondes environ. Je ne suis pas sûr des 30 secondes, le temps me semble une notion bien vague maintenant. J'en viens à souhaiter que l'un des juges allume une cigarette pour mettre fin à mes souffrances. J'ai décidé d'arrêter de respirer, c'est devenu trop douloureux et ça ne servait à rien, je n'arrivais plus à filtrer l'oxygène dans mes poumons. Pour respirer, je vais brancher directement un tuyau sur le trou qui se forme dans mon estomac.
- CARI # 8 – LE CARI À DÉFRISER LES CHEVEUX DE KIKI
Juge 2 -- Ce dernier cari est un plat très équilibré, ni fade ni épicé. C'est vraiment dommage d'en avoir perdu une grande quantité quand le Juge 3 a lâché une caisse, est tombé dans les pommes en s'écroulant sur la marmite brulante qui s'est renversée sur sa tête. Je ne sais pas s’il survivra à ça. Pauvre zoreille (métropolitain), encore heureux qu'il n'a pas eu à gouter à un plat très relevé comme on les fait par chez nous.
(source)
Terrible. Joli travail...
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